Communiqué : Quand « Le « choc des savoirs » ignore la pluralité de nos langues !

Le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse avait annoncé la mise en place d’une mission intitulée “exigence des savoirs”, qui devait créer selon ses termes un “choc des savoirs” en formulant des propositions dans des domaines aussi variés que les programmes, les pratiques pédagogiques, l’organisation pédagogique,  la culture générale… Elle devait reposer sur une série de travaux dont des auditions “d’enseignants, organisations syndicales, fédérations de parents, associations disciplinaires, sociétés savantes, etc.”

Nous ne pouvons que constater que cette “grande concertation” s’est achevée sans qu’aucun acteur de l’enseignement en langue régionale n’ait été ni auditionné, ni même contacté. Nous le savons donc, avant même publication des résultats, les bienfaits du bilinguisme n’y seront pas cités, et les propositions faites ne concerneront qu’un enseignement strictement monolingue, ignorant les signaux d’alerte que nous multiplions depuis des années.

Pourtant, le Président de la République avait déclaré, le 30 octobre dernier, lors de l’inauguration de la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts : “Toutes les langues sont égales du point de vue de la dignité, c’est pourquoi je veux que nos langues régionales soient encore mieux enseignées”.  De belles paroles qui ne sont, encore une fois, pas suivies d’actes, tout comme n’avait pas été suivie d’actes la publication de la circulaire concernant les langues Régionales du 14 décembre 2021. Cette circulaire, censée résoudre la crise générée par la censure partielle du Conseil constitutionnel de la loi du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, et issue d’un arbitrage politique en haut lieu, va bientôt fêter son deuxième anniversaire, mais n’est toujours pas pleinement mise en œuvre.

Suite à l’audition de notre collectif  par le groupe d’Études Cultures et langues régionales à l’Assemblée Nationale le 8 novembre dernier, nous demandons un véritable statut pour nos langues dans l’Éducation et, au-delà, dans la vie publique, ce qui passe par une modification de l’article 2 de la Constitution française. 

En effet, ce n’est que depuis la révision constitutionnelle de juin 1992 qu’a été ajouté l’alinéa qui institue le français comme langue officielle de la République, disposition présentée alors comme une protection contre l’invasion de l’anglais. Or, depuis lors, l’apprentissage de l’anglais est devenu obligatoire au collège et cette langue a conquis toute sa place sur les cartes nationales d’identité, tandis que les langues régionales restent interdites dans de nombreux domaines, que ce soit à l’école (censure partielle de la loi “Molac” par le Conseil constitutionnel), au sein des collectivités (décisions des tribunaux administratifs contre la collectivité de Corse ou contre quatre municipalités catalanes) ou à l’État Civil (procès Fañch).

Du fait de l’interprétation particulière de cet article 2, l’article 75-1 de la Constitution, adopté en 2008,« Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France », “n’institue pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit” selon l Conseil Constitutionnel.  

C’est pourquoi, trente ans après la réécriture de l’article 2, notre collectif demande sa modification pour sortir nos langues de cette situation de blocage et de précarité